une longue marche

          Mon épouse Ola et moi, sommes les bergers d'une petite communauté de disciples juifs en Yéshoua, dispersés dans le désert du Néguev, au sud d'Israël. Tous les frères et soeurs de notre communauté sont des Juifs, nouveaux immigrants. La majorité arrive de l'ex-URSS, et quelques-uns de France. Notre seule langue commune est l'hébreu, en particulier entre mon épouse et moi.

          J'ai commencé à connaître le Seigneur vers l'âge de seize ans, en lisant une Bible abandonnée chez mes parents, que personne n'avait lue. Immédiatement, je crus en ce Dieu qui se révélait, et acceptais ce livre comme la clé de ma vie. Il répondait à toutes les questions qui me tourmentaient à cette époque, car nous avions plusieurs professeurs marxistes.

          Simultanément, à force d'insistance - car mes parents le cachaient - je découvris que mes grands-parents, que je savais originaires de Russie et disparus pendant la guerre, étaient Juifs,  c'était le motif de leur mort, et  cela s'était produit précisément aux camps nazis d'extermination d'Auschwitz et Maïdanek. Je ne pouvais que relier mon origine juive avec la révélation du Dieu de ma Bible, et  m'y enraciner.

          Ensuite, bien que je me sois souvent et malheureusement éloigné du Seigneur, ce Livre est pratiquement resté le guide de mes pensées, parmi toutes mes lectures dans les domaines historiques, géographiques, politiques et économiques.

          Cependant, je suis toujours resté un solitaire, et ne suis jamais devenu membre de quelque église. Ce n'est pas que je refusais le contact d'autres croyants, mais je menais une quête permanente de la vérité, trouvant malheureusement toujours dans les traditions des hommes quelque opposition avec les Ecritures. Je commençais à étudier seul l'hébreu et le judaïsme, que ma famille ne connaissait ni ne pratiquait. Je ne m'expliquais pas ce que les hommes avaient fait de Dieu, ni de Yéshoua, pourquoi les Chrétiens étaient si divisés entre eux, et souvent très éloignés de son enseignement, et pourquoi, les Juifs dont je recherchais la compagnie à présent, ne voulaient pas en entendre parler.

          A l'âge de 20 ans, en mai-juin 1967, l'actualité montrait les préparatifs de l'anéantissement du minuscule Etat d'Israël. En six jours, le Dieu d'Israël conduisit exactement l'inverse. Ce n'était pas fait pour me détacher de ma Bible. J'avais des discussions passionnées avec un oncle devenu chrétien évangélique avec lequel cela était en opposition avec ma famille. Il m'a persuadé d'aller me faire baptiser à la Porte Ouverte, près de Châlon-sur-Saône. Je voulais ainsi avant tout marquer mon obéissance à Dieu. Mais, parallèlement, mes vingt ans m'entrainaient vers une jeune fille de la région, institutrice débutante comme moi, que je voulais amener au Seigneur. Nous avons échaudé ensemble le projet de partir enseigner en Afrique et nous nous sommes mariés en moins de trois mois, contre l'avis de nos parents, et sans  même me souvenird'avoir pensé à consulter le Seigneur avant une telle décision.

          Nous avons eu deux fils rapidement, David et Lucas, et nous ne sommes jamais partis comme missionnaires, comme j'en rêvais. Mais ma femme et moi avons décidé d'adopter quatre enfants orphelins du Tiers-Monde : Sarah, âgée de deux ans, née en Corée du sud ; Yohanna, âgée de deux ans, née au Guatemala ; Nathanaël, âgé de neuf ans, né en Corée du sud et Benjamin, âgé de quinze ans, né au Cambodge. Nous avons recherché à donner un sens à notre vie. Nous avons connu ensemble, dans cette aventure, de grandes joies avec nos enfants, et aussi d'immenses difficultés, tant pécuniaires que psychologiques et spitiruelles ; car nos nouveaux enfants ont eu auparavant une enfance chaotique. Sur la manière de conduire notre vie et notre famille, la communauté nous faisait entièrement défaut, sur une pareille entreprise. Ma femme n'était pas juive, et n'a jamais voulu lire la Bible. Je commençais à parler de Dieu aux enfant, mais leur mère dénigrait de plus en plus ce qui était pour moi le rocher de ma vie. Nos enfants grandissaient sans s'intéresser à Dieu, sans chercher un sens particulier à leur vie.

          Mes idées et ma conception de la vie étaient rejetées, et le peu d'amis que je trouvais pour les partager, étaient qualifiés comme moi de "membres d'une secte". Je me réfugiais dans ma nouvelle profession de banquier, entreprenais même à l'université un troisème cycle en économie, après avoir été le subordonné de mon épouse au début de ma courte carrière d'enseignant. Mon Israël et mon Dieu étaient aussi mon refuge et mon espérance, face à un monde hostile, à une famille qui me marginalisait, à un métier vain où je devais sans cesse mentir au client pour réaliser le chiffre d'affaires qui m'était imparti. Mon Dieu était loin - je n'en avais finalement pas fait le centre de ma vie - et ma bien-aimée Israël pour qui je soupirais, était par tous attaquée ou critiquée. En réaction aux médias français de plus en plus anti-israéliens (embargo sur le pétrole, suite à la guerre de Kippour 1973, guerre du Liban en 1982) je marquais ma solidarité en me rapprochant de plus en plus de la communauté juive, tout en croyant être le seul dans ma synagogue à connaître Yéshoua.

          Il a fallu de cruels bouleversements dans notre famille et dans ma profession pour que je réussisse à décider ma famille de quitter la France pour s'installer en Israël. C'était au soir de Kippour 1992. Nous sommes repartis de zéro, à l'âge de 46 ans. "Mon Israël" a immédiatement donné à mon épouse un emploi de professeur de français, et la France lui a accordé une pension de jeune retraitée en tant que fonctionnaire, mère de famille nombreuse. Je suis resté sur le carreau, non sans tenter sans cesse, pendant plus de trois ans, de dénicher un emploi. Mais << mon Israël >> ne me voulait que dans des places de veilleur de nuit, vendeur de tee-shirts ou réceptionniste d'hôtel. Jusqu'à ce que, complètement cassé et à force d'être seul avec Dieu la nuit, j'ai compris qu'IL ne m'avait pas ramené dans Son pays, pour y reprendre une vie et une activité professionnelle comme celles que j'avais menées en France pendant 26 ans. Il n'était plus question à présent d'un simple changement d'orientation professionnelle : le Seigneur me menait, nuit après nuit, dans un triste bilan de ma vie non consacrée, pleine de compromis, et jour après jour,
je voyais Israël sans son Dieu

          J'ai utilisé en fin de compte une période pendant laquelle me seraient versées des indemnités de chômage pour m'inscrire à une école biblique à Tel-Aviv,dans le but d'étudier les Ecritures à partir de l'hébreu. C'était en 1995-1996, à l'époque du massacre du Temple Solaire et de l'assassinat du Premier Ministre Rabin. Mes petits emplois, mes idées à contre-courant, et ma dernière initiative de revenir à la vocation enterrée à l'âge de 20 ans ont déclenché cette fois un rejet violent et définitif de ma femme. Elle m'a assimilé à la secte des suicidés, aux assassins du "Martyr de la Paix" que l'opinion internationale faisait du Premier Ministre, et m'a déclaré finalement qu'elle ne -serait pas l'épouse d'un pasteur ou d'un rabbin, et qu'elle trouverait bien quelqu'un de plus intéressant...-.  Nos enfants ont pris à leur tour leur indépendance, et notre cadette, lors de ses 18 ans, est partie pour le service militaire. Aussi, ma femme m'a demandé de quitter la maison car mes petits emplois ne payaient pas les mensualités. Elle disait, grâce au divorce, vouloir se protéger. Jamais je n'avais envisagé une situation pareille...

          Les coups les plus durs  ne me sont pas venus des incroyants, ni même de celle dont j'avais été le mari, même mal assorti. Ils sont venus, par surprise, de faux frères qui ont trouvé digne de jeter la première pierre au divorcé, ce sur quoi, précisément, le Seigneur met en garde. J'étais d'autant moins préparé à cette situation, jamais je n'avais, en 28 ans de mariage, regardé une autre femme.. Il m'a fallu encore du temps avant de comprendre que si Yéshoua enseigne : "que l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni". Mt 19 : 6, il était prudent d'abord d'évaluer si c'était le Seigneur qui nous avait unis lorsque nous avions vingt ans, et si seulement  nous Lui avions demandé son avis... Je n'ai pas trouvé non plus, en ce temps, beaucoup de frères qui acceptent la parole de Paul dans 1 Corinthiens 7 : 15 à propos du croyant dont le conjoint incrédule veut se séparer.

          Ce que Ola et moi nous voyons, c'est combien les voies du Seigneur sont impénétrables, et comme c'est Lui qui nous a unis, cette seule fois-ci, et à son service. Les frères et soeurs qui nous voient vivre ne peuvent que constater que le Seigneur Lui-Même s'est constitué de nous deux un unique outil. Quant à mes enfants, ils ne peuvent que constater à présent, que ma vie est devenue cohérente avec ma foi. J'ai enfin cessé le grand écart entre des convictions qui n'étaient que théoriques et les réalités quotidiennes. Je peux enfin, librement, être auprès d'eux un témoin du Seigneur. Comme de jeunes adultes, ils observent que leur père est devenu, en même temps qu'eux, un mari qui tient son rôle dans sa maison. Quant à mes parents âgés, avec lesquels ma première femme était fâchée (et moi aussi, pusique je trouvais juste de défendre mon épouse), ils ont accepté ma demande de pardon et sont consolés d'avoir une belle-fille qui les aime et leur parle de Dieu.

          Après avoir été brisé sur le plan professionnel et pour l'alya, puis par ma famille, et enfin par une église, je ne peux que citer encore Paul qui affirme ne pas se juger lui-même. 1 Co 4 : 3.

          <<
OUBLIANT LES CHOSES QUI SONT DERRIERE, ET TENDANT AVEC EFFORT VERS CELLES QUI SONT DEVANT, JE COURS DROIT AU BUT POUR LE PRIX DE L'APPEL CELESTE DE DIEU DANS LE MESSIE YESHOUA  >>  Phil 3 : 14.

          Avec Ola, ma femme biblique qui est ma soeur, j'ai enfin trouvé la paix de savoir que le Seigneur m'a rétabli dans la vocation à laquelle, il y a trente ans, IL m'avait appelé. Ayant tout raté auparavant, je ne puis plus que gagner à présent, dans l'attente de sa proche venue.

Michaël SCHNEIDER.           

         

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